Les foies jaunes

À propos du 5 décembre

Le père Ubu de la C.G.T et le bureaucrate-en-chef de Force Ouvrière se dégonflent déjà. Ces bons syndicalistes ont l’audace d’annoncer, quelques jours avant la grande grève du 5 décembre, qu’ils sont prêts à tout annuler au moindre geste du gouvernement. Beaux joueurs, Martinez et Veyrier ne tentent pas le plus petit bluff. Ils n’essaient même pas de se donner un air d’intransigeance pour peser sur les négociations. On les voit à plat ventre avant les premiers coups. Ce très mauvais poker est incompréhensible pour ceux qui s’imaginent encore qu’ils veulent gagner la partie.

Si les syndicats vont à la bataille, c’est uniquement poussés par la base, elle-même chauffée par le courage des Gilets Jaunes. C’est une concession faite pour tenter de reprendre la main sur le conflit social, qui s’est manifesté pendant une année entière hors de leur orbite — ce qui est en soi une humiliation. Les foies jaunes n’ont qu’une seule peur : que la majorité des travailleurs suive le mauvais exemple d’une contestation incontrôlée qui prenne acte de leur anéantissement.

Une fois que les centrales syndicales estimeront avoir retrouvé leur assise, à grand renfort de grèves et de manifestations symboliques, elles feront tout pour empêcher la victoire du mouvement. Les bureaucrates préfèrent cent fois un échec de la contestation à une réussite qui leur échappe. Or, on a vu avec les Gilets Jaunes qu’il faut un conflit violent et hors de contrôle pour obtenir la moindre concession du gouvernement Macron, voire le seul ralentissement de ses destructions. Il n’y aura de réussite que si elle échappe aux syndicats. Ils espèrent donc échouer.

Voilà pourquoi, depuis le début, les bureaucrates sont effrayés par l’enthousiasme que la grève suscite. Voilà pourquoi ils ont fait le choix de ce fameux 5 décembre, quinze jours avant les vacances de Noël, pour être certains que le mouvement soit coupé dans son élan et se réduise à un tour de manège. Voilà comment s’expliquent leurs déclarations conciliantes avant même le début du conflit. Le sabotage a déjà commencé : ils veulent faire de la lutte un enfant mort-né.

Il faut donner vie à leur cauchemar. Ce n’est pas encore la fièvre révolutionnaire, mais tout le monde sent que la température monte. Si l’autonomie des Gilets Jaunes rencontrait la grève, elle deviendrait sauvage.

— 27.11.2019